Le théâtre de Kurô Tanino s’est exporté lors de deux représentations parisiennes

©Takashi Horikawa
Dans le cadre du festival d’automne à Paris, Kurô Tanino, ancien psychiatre devenu metteur en scène, a pu investir le théâtre de Gennevilliers pour deux pièces d’envergure, dans une auberge de sources thermales et dans un restaurant.
Avec son souci du détail et ses décors immersifs surprenants, Kurô Tanino manie un théâtre de premier abord réaliste, avant que les personnages haut en couleurs s’engouffrent dans un chemin sensuel, dérangeant, burlesque ou sulfureux.
Du 20 au 24 septembre, The Dark Master a éblouhi les spectateurs en stimulant leurs sens ; la vue bien évidemment mais également l’odorat avec des effluves du restaurant reconstitué sur scène. Dans ce restaurant justement, un jeune ramoneur se voit offrir la place du chef, qui disparaît mais observe son nouveau protégé en toute discrétion. Les clients habituels défilent, dont la prostituée favorite du précédent chef et un étrange personnage chinois, plus préoccupé par le potentiel économique du lieu que le contenu des assiettes. Kurô Tanino évoque en filigrane la dépossession du patrimoine et les rapports de domination. Maniant aussi bien le bruit et le silence, cuisinant le spectateur par un début classique puis déroutant, le théâtre de Kurô Tanino révèle avec éclat l’essence même de notre société moderne et ses paradoxes.
Dans sa seconde pièce Avidya, l’auberge de l’obscurité, qui s’est aussi tenue au théâtre de Gennevilliers du 25 au 29 septembre, deux citadins de Tokyo ont réveillé la quiétude des locataires d’une auberge perdue en campagne japonaise. Déboussolés par cette arrivée, une vieille dame, deux geishas, un aveugle et un sansuke (homme qui s’occupe des bains, masse et coiffe les clients, également géniteur pour les femmes qui ne réussissaient pas à avoir d’enfant), expriment tour à tour leurs peurs et désirs de cette modernité qui contraste avec leur paisible tradition. La trêve de quiétude est loin de prendre fin à l’annonce de la démolition de l’auberge pour faire place au Shinkansen : une allégorie brutale de “faire table rase du passé”.

©Takashi Horikawa

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©Shinsuke Sugino

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